Nous nous limiterons à une étude applicable aussi bien au rugby qu'à des sports impliquant des risques traumatiques du même ordre, les gros délabrements maxillo-faciaux sortant du cadre de notre étude.
Le problème primordial réside en la gestion de la prise de risque, et en son appréciation juste et rapide. Cela sous-entend une bonne maîtrise de la technique spécifique du sport. L'acquisition de la technique individuelle et/ou collective, libère le joueur dans sa pratique et lui permet de choisir et de réaliser efficacement sa gestuelle en fonction de la situation.
Dans tous les sports où l'implication physique est nécessaire, seule une "réactivité adaptée" réduira les risques après une préparation adéquate.
Mettons bien à part tous les problèmes liés à l'agressivité non-contrôlée, induisant là aussi un travail important de la part des éducateurs.
SAMETZKY (59) fait apparaître un caractère particulier des traumatismes sportifs. Contrairement aux accidents de circulation ou aux accidents dentaires de l'enfance, on cernera facilement le lieu, le temps d'exposition, et les pratiques à risques :
- le lieu est défini : terrain, ring, salle ,
- la durée de mise en danger est limitée : phases d'entraînement, de compétitions. Elles excèdent très rarement cent heures par an,
- les sports responsables semblent parfaitement bien répertoriés : rugby à XIII, à XV, hockey sur glace, football américain, sports de combat, sports collectifs de " contact "
Chaque nouvelle situation d'accident semble toujours
bien particulière et différente. Il arrive que le sportif se
blesse seul, avec une partie de son corps par exemple : le choc classique
genou-mâchoire inférieure. Il peut également se blesser
avec un partenaire : Chocs avec le coude, le genou, le talon, la tête,
le poing
L'accident peut également se produire avec une personne extérieure
au jeu (spectateur, entraîneur
), ou avec un objet quelconque.
Dans tous les cas la nature de l'élément de frappe joue un rôle important : par exemple un poing nu est plus dévastateur pour le secteur bucco-dentaire qu'un poing ganté de boxeur.
Lors d'un choc avec un corps étranger, nous noterons des variations principalement en fonction de sa vitesse et de sa masse :
- plus la masse est élevée, et la vitesse basse, plus les lésions seront sous une forme d'écrasement. Elles seront complexes, intéressant dents et tissus de soutien,
- avec un objet de masse réduite et de vitesse élevée, les lésions demeureront souvent purement dentaires.
Bouche fermée, les rapports occlusaux entre les deux arcades sont multiples. Toutes les dents sont fortement engrénées par la correspondance harmonieuse entre pointes cuspidiennes et fosses homologues des dents antagonistes.
La multiplicité des points de contacts, régulièrement répartis sur l'arcade réalise un véritable ensemble de type boîte-couvercle.
Mâchoires serrées, mandibule et maxillaire forment un tout difficilement dissociable où le blocage occlusal s'ajoute aux forces musculaires des muscles élévateurs. Mais la position mandibulaire normale la plus fréquente est la position de repos : avec une béance entre les deux arcades de deux à trois millimètres dans la zone molaire. Et cette position est immédiatement reprise en phase de respiration buccale (la plus fréquente en cours d'effort).
Il apparaît donc évident que les sportifs, sans orthèse procurant un calage postérieur, auront fréquemment une absence de contacts occlusaux au moment d'un impact.
Lèvres et joues sont écrasées entre l'élément de frappe et la face externe des dents, d'autant plus agressives qu'elles sont imparfaitement alignées. Nous avons déjà décrit en détails ces traumatismes des tissus mous.
Des coups de forte intensité portés par un élément dur (poing nu, coude tête, genou, chaussure, etc.) entraîneront généralement un éclatement des lèvres.
Si le nez est intéressé, les os propres se fractureront facilement, et l'arcade dentaire supérieure sera en toute circonstance la première structure rencontrée.
Les forces se répartiront sur les dents touchées en engendrant, suivant leur intensité, des luxations, des fêlures, des mortifications, des fractures alvéolaires ou basilaires, ou même des disjonctions.
- Coup latéral : la mandibule subira un faible déplacement latéral, durant lequel l'essentiel des forces s'exercera sur le maxillaire supérieur. Au-delà, la mandibule, plus fragile et déformable transversalement pourra subir une fracture de la zone canine ou angulaire.
- Coup frontal : L'essentiel des forces s'exercera immédiatement sur l'arcade dentaire supérieure, la mandibule étant soumise à un mouvement d'ouverture.
Si le blocage occlusal est normal, et la contraction musculaire suffisante, le massif facial devient un tout difficilement dissociable où seules les dents maxillaires directement touchées seront menacées.
La mandibule " flottante " sera projetée dans l'axe de frappe, phénomène visible en boxe, où la pointe du menton est classiquement visée.
- Coup transversal antérieur : c'est ce que l'on appelle plus classiquement le crochet au menton. La mandibule projetée en latéralité forcée subira, du côté correspondant au coup, une projection en avant, et du côté opposé, un blocage postéro-latéral du condyle pouvant occasionner des fractures du col du condyle. Les prémolaires et canines peuvent interférer avec leurs homologues et se fracturer. Le KO est possible par ébranlement de l'oreille interne opposée et perte d'équilibre.
- Coup transversal postérieur : c'est un coup classique au rugby, en mêlée, ou sur coup de poing volontaire. Après un mouvement latéral de très faible amplitude, la mandibule bloquée se déformera et pourra subir des fractures angulaires, condyliennes, et canines.
- Coup frontal : il menacera les zones symphysaires et les cols des condyles.
- Coup ascendant : c'est ce que l'on appel en anglais "uppercut". Les contacts dentaires inter-arcades violents pourront provoquer des fêlures et des fractures longitudinales, surtout de prémolaires supérieures, des luxations avec ingression des incisives supérieures et inférieures. Un ébranlement, véritable onde de choc engendrée par le contact inter-arcades, sera transmis au massif crânien et aux masses cérébrales, pouvant provoquer le KO avec perte de connaissance.
La mandibule forme alors avec le maxillaire et le massif facial un tout résistant. Fortement bloquée par l'occlusion, immobilisée par les muscles masticateurs dans plusieurs directions, emballée dans la zone angulaire, la mandibule est pratiquement indéformable.
Nous retiendrons donc que :
- les lèvres se blessent sur les dents,
- les risques de fractures par chocs directs n'intéressent globalement
que les dents supérieures et antérieures,
- une arcade dentaire incomplète est plus fragile,
- les contacts brutaux inter-arcades menacent toutes les dents.
- Le système stomatognatique dans son ensemble, le massif facial, les
zones cérébrales, sont moins vulnérables mâchoires
serrées.