9 - RESULTATS DE L'ENQUETE EPIDEMIOLOGIQUE DANS LES CLUBS

9.1 - La population

9.1.1 - Généralités

370 rugbymen ont été examinés dans 12 clubs du Département de la Seine-Saint-Denis.

Tous les sujets sont de sexe masculin. La moyenne d'âge est de 21,1 ans (12 à 47 ans). La taille moyenne est de 176,37 cm (140 à 204 cm). Le poids moyen est de 77,85 kg (45 à 150 kg)

9.1.2 - Catégorie socio-professionnelle

Elèves ou étudiants
Employés
Cadres ou professions intellectuelles supérieures
Professions intermédiaires
Artisans, commerçants, chefs d'entreprises
Ouvriers
Sans emploi

 

Nombre joueurs

221
41
40
38
14
5
11

 

%

59,7
11,1
10,8
10,3
3,8
1,4
2,91

Niveau scolaire de la population :


Lycée
Collège
2nd cycle
BAC
CAP
BEP
BAC pro

Nombre joueurs

103
98
77
37
28
18
9

%

27,8
26,5
20,8
10
7,6
4,9
2,4

 

9.1.3 - Pratique sportive

Tous les joueurs sont licenciés à la FFR (Fédération Française de Rugby) et participent aux compétitions organisées.

La fréquence d'entraînement moyenne est de 3 h 27 min/semaine en période scolaire et descend à 1 h 18 min/semaine pendant les vacances.

Les 370 rugbymen se répartissent selon les différents postes :

Pilier
Talonneur
Deuxième ligne
Troisième ligne aile
Troisième ligne centre
Demi de mêlée
Demi d'ouverture
¾ centre
¾ aile
Arrière

41 joueurs
38 joueurs
56 joueurs
43 joueurs
49 joueurs
24 joueurs
24 joueurs
34 joueurs
30 joueurs
31 joueurs

 

La plupart des joueurs pratiquent le rugby à un niveau confirmé (c'est-à-dire depuis plus de 5 ans).

 

Débutants (1 à 2 ans)
Moyens (2 à 5 ans)
Confirmés (+ 5 ans)

Nombre joueurs

51
52
267

%

13,8
14,1
72,1

 

9.2 - Port de protection dentaire

9.2.1 - Généralités

- 53,5 % des joueurs (198) ne portent jamais de protection.
- 25,1 % des joueurs (93) ne la portent que parfois, c'est-à-dire le plus souvent en match.
- 21,4 % des joueurs (79) la portent toujours, en match comme à l'entraînement.

Une forte majorité des joueurs ne portent donc pas ou occasionnellement leur protège-dents (78 %). Parmi les protections portées, les protège-dents du commerce sont majoritaires, puisqu'ils représentent 96 % des protections.

Le modèle le plus répandu est le protège-dents thermoformable recouvrant les dents maxillaires (145 joueurs soit 84,3 %). Les modèles recouvrant dents maxillaires et mandibulaires représentent 20 joueurs (11,7 %).


9.2.2 - Port du protège-dents en fonction du poste occupé

¾ centre
Arrière
Demi d'ouverture
Pilier
Deuxième ligne
Demi de mêlée
¾ aile
Talonneur
Troisième ligne
Troisième ligne centre

Toujours

14,7 %
16,1 %
16,7 %
19,5 %
19,6 %
25,0 %
20,0 %
21,0 %
23,2 %
32,7 %

Parfois

23,5 %
29 %

16,7 %
39,1 %
25,0 %
25,0 %
26,7 %
26,3 %
25,6%
32,7 %

Jamais

61,3 %
54,9 %
66,6%
46,4 %
55,4 %
54,2 %
53,7 %
52,7 %
51,2 %
46,9 %


9.2.3 - Port du protège-dents selon le niveau de pratique

 

Débutant
Moyen
Confirmé

Toujours

25,0 %
9,6 %
22,8 %

Parfois

25,0 %
21,2 %
25,8 %

Jamais

50,0 %
69,2 %
51,4 %


9.2.4 - Port du protège-dents en fonction du niveau socio-professionnel

 

Cadres ou prof. Int. Sup.
Employés
Prof. Intermédiaires
Elèves/étudiants
Ouvriers
Artisans, commerçants
Sans emploi

Toujours

47,5 %
41,5 %
21,1 %
14,0 %
0,0 %
14,3 %
18,1 %

Parfois

15,0 %
24,4 %
26,3 %
27,6 %
40,0 %
21,4 %

9,1 %

Jamais

37,5 %
34,1 %
52,6 %
58,4 %
66,0 %
64,3 %
72,8 %

Le port du protège-dents augmente avec le niveau social.


9.2.5 - Raisons de l'abandon du protège-dents

Pour les 291 rugbymen qui ne portent pas toujours leur protège-dents, on retrouve les doléances :

Inconfort
Pas de risque
Manque de d'information
Trop cher

65,9 %
35,7 %
19,2 %
1,4 %

En fonction du poste ces doléances varient.

 

Pilier
Talonneur
Deuxième ligne
Troisième ligne aile
Troisième ligne centre
Demi de mêlée
Demi d'ouverture
¾ centre
¾ aile
Arrière

Manque d'info.

12,2 %
13,2 %
19,6 %
16,3 %
8,2 %
4,2 %
0,0 %
20,6 %
33,3 %
13,4 %

Pas de risque

24,4 %
34,2 %
23,2 %
34,9 %
20,4 %
33,3 %
8,3 %
38,2 %
30,0 %
35,5 %

Inconfort

60,9 %
57,9 %
58,9 %
46,5 %
40,8 %
39,4 %
62,5 %
44,1 %
46,7 %
48,4 %

Trop cher

0,0 %
0,0 %
1,8 %
0,0 %
2,0 %
0,0 %
4,2 %
2,9 %
0,0 %
0,0 %

Beaucoup de joueurs pensent qu'ils sont bien informés des risques qu'ils encourent et du rôle du protège-dents. Les ¾ aile semblent les moins bien informés au contraire des demis d'ouverture. Les ¾ centre, troisièmes ligne aile, arrières et talonneurs ont pour particularité de sous-estimer le risque encouru lors de la pratique sportive. Les demis d'ouverture sont les plus conscients des risques.

9.2.6 - Conclusions liées au port du protège-dents

Le protège-dents est très peu porté lors de la pratique du rugby. La raison la plus souvent évoquée pour l'abandon du protège-dents est l'inconfort de ceux-ci. Les joueurs se sont souvent plaints du fait qu'ils n'arrivaient pas à respirer, à communiquer.

Les ¾ centre et demis d'ouverture sont les postes qui se passent le plus de protège-dents.
Les troisièmes ligne sont ceux qui portent le plus leur protège-dents en permanence, alors que les piliers et arrières prennent seulement conscience de leur utilité en match.

Le port de la protection ne varie pas beaucoup en fonction du niveau de pratique. Toutefois les joueurs de niveau moyen ont tendance à l'abandonner.

On peut également constater que le port du protège-dents augmente avec le niveau socio-professionnel.

Les demis d'ouverture sont les joueurs les plus gênés à l'inverse du demi de mêlée.

Enfin, les ¾ centres sont les joueurs qui pensent le plus que le protège-dents n'est pas nécessaire vis-à-vis des risques encourus, à l'inverse des demis d'ouverture.

9.3 - Etat bucco-dentaire de la population

9.3.1 - Prévalence cariogène

28,9 % des rugbymen sont porteurs d'une ou plusieurs couronnes délabrées (107 personnes). On dénombre 268 couronnes délabrées soit 2,5 par personne concernée.

9.3.2 - Classe d'Angle molaire

- 220 joueurs soit 59,5 % de la population sont en classe I,
- 103 joueurs soit 27,8 % de la population sont en classe II,
- 47 joueurs soit 12,7 % de la population sont en classe III.

9.3.3 - Dernière consultation dentaire

Elle remonte à :

- moins de 6 mois pour 112 personnes,
- moins d'un an pour 64 personnes,
- plus d'un an pour 194 personnes.

9.4 - Traumatologie

9.4.1 - Généralités

- 212 (57 %) personnes traumatisées ont été dénombrées au total, toutes circonstances confondues,
- 76 % de ces traumatismes sont liés à la pratique du rugby,
- 167 joueurs soit 43,8 % ont subi un traumatisme important lié au rugby.


9.4.2 - Traumatismes alvéolo-dentaires liés au rugby

9.4.2.1- Prévalence

103 joueurs ont été victime d'un ou plusieurs traumatismes alvéolo-dentaires, c'est-à-dire 23,7 % des joueurs. Au total on dénombre 128 dents traumatisées.

9.4.2.2 - Localisation

11
21
32
22, 31, 41
25, 46, 12, 42
13, 23, 16
26, 34, 36, 37, 43, 45

53 dents touchées
33 dents touchées
6 dents touchées
4 dents touchées
3 dents touchées
2 dents touchées
1 dent touchée
41,4 %
25,8 %
4,7 %
3,1 %
2,3 %
1,6 %
0,8 %



Arcade supérieure
Arcade inférieure
Antérieur
Postérieur
103 dents traumatisées
25 dents traumatisées
115 dents traumatisées
13 dents traumatisées
80,5 %
16,1 %
89,8 %
10,2 %

Il faut donc retenir que les dents traumatisées sont situées majoritairement en antérieur et au maxillaire. 11 et 21 représentent à elles seules 67 % des dents touchées.

9.4.2.3 - Types de traumatismes

Fracture sans exposition pulpaire
Fracture avec exposition pulpaire
Fêlure
Luxation latérale
Fracture corono-radiculaire
Extrusion
Expulsion
Intrusion
84 dents
19 dents
10 dents
6 dents
3 dents
3 dents
2 dents
1 dent
65,6 %
14,8 %
7,9 %
4,7 %
2,3 %
2,3 %
1,6 %
0,8 %

Les fractures coronaires sont majoritaires. Elles représentent 80 % des traumatismes dentaires rencontrés.


9.4.2.4 - Soins et types de soins

38 % des traumatismes ont donné lieu à une consultation dentaire. Le motif de cette consultation est le plus souvent liée à la douleur (55 %) et à l'esthétique (42,5 %), la fonction ne motivant que 17,5% des consultations. Les soins effectués ne concernent que 25,6 % des dents traumatisées.

Types de soins délivrés :
- conservateur : 16 (48 %),
- prothèse : 14 (42 %),
- chirurgie : 3 (10 %).

17,5 % des traumatismes ont donné lieu à une déclaration d'assurance.

9.4.3 - Traumatismes muqueux liés au rugby

9.4.3.1 - Prévalence

On dénombre 23,6 % des joueurs touchés.

9.4.3.2 - Localisation

- Lèvres : 77 traumas (88,5 %)
- Langue : 2 traumas (2,3 %)
- Gencive : 4 traumas (4,6 %)
- Joues : 4 traumas (4,6 %)

9.4.3.3 - Caractéristiques des traumatismes

- Dilacération : 78 traumas (89,7 %)
- Contusion : 7 traumas (8 %)
- Abrasion : 2 traumas (2,3 %)

9.4.3.4 - Soins et types de soins

9 traumatismes ont donné lieu à une consultation soient 10 %. La douleur est la principale motivation à la consultation (55,5 %). L'esthétique et la fonction ne sont citées que dans 11,1 % des cas.

Soins effectués :
- aucun : 83 (95,4 %),
- chirurgie : 4 (4,6 %).

2,3 % des traumatismes ont donné lieu à une déclaration d'assurance.

9.4.4 - Traumatismes osseux liés au rugby

9.4.4.1 - Prévalence

On dénombre 5 traumas osseux

9.4.4.2 - Localisation

- Mandibule : 2
- Condyle : 3

9.4.4.3 - Caractéristiques des traumatismes

- Fracture totale : 3
- Luxation : 2

9.4.4.4 - Soins et types de soins

Tous les traumas ont donné lieu à une consultation. 3 d'entre eux ont donné lieu à une intervention chirurgicale. Dans tous les cas, le motif de la consultation était uniquement la douleur. Seuls les traumas ayant donné lieu à une intervention chirurgicale ont fait l'objet de déclaration d'assurance.


9.4.5 - Etude des mécanismes des traumatismes liés au rugby

9.4.5.1 - Traumatismes alvéolo-dentaires et port du protège-dents

93,2 % des joueurs ne portaient pas de protection dentaire le jour du traumatisme.

Pourtant le jour de l'examen, parmi ces joueurs :
- 51 % ne la portent jamais,
- 22 % parfois,
- 27 % toujours.

Le traumatisme semble avoir été pour certains l'occasion d'une prise de conscience des risques encourus.

Le port du protège-dents du commerce aurait donc une efficacité certaine dans la prévention des traumatismes alvéolo-dentaires (93 % des joueurs ne portaient pas de protège-dents le jour du traumatisme).


Cependant, 79 % des joueurs ne le porte pas régulièrement du fait principalement de son inconfort (motif cité par 65,9 % des joueurs).

Le port du protège-dents est efficace dans la prévention de la traumatologie dentaire mais inadapté à la pratique du rugby.

9.4.5.2 - Traumatismes alvéolo-dentaires et poste occupé

Demi d'ouverture
Talonneur
Troisième ligne aile
Arrière
Pilier
Troisième ligne centre
Demi de mêlée
¾ centre
Deuxième ligne
¾ aile
50 % touchés
36 % touchés
32,6 % touchés
32 % touchés
31 % touchés
26,5 % touchés
25 % touchés
23 % touchés
19,6 % touchés
6 % touchés

Le poste le plus à risque est le demi d'ouverture. Malgré qu'ils soient les joueurs les plus conscients des risques, ce sont eux qui portent le moins le protège-dents et qui le supportent le moins.

Les ¾ ailes sont les joueurs les moins touchés, bien qu'ils tolèrent et portent moyennement bien le protège-dents.

Il existe donc des risques liés au poste même, mais aussi des risques liés au fait que le protège-dents est encore moins bien supporté par certains postes.

9.4.5.3 - Traumatismes alvéolo-dentaires et niveau de pratique

- Débutants : 4 joueurs touchés (7,8 %)
- Moyens : 8 joueurs touchés (15,3 %)
- Confirmés : 91 joueurs touchés (34,1 %)

Plus le nombre d'années augmente en pratique, plus le risque de traumatismes augmente.

9.4.5.4 - Etat bucco-dentaire et traumatismes alvéolo-dentaires

- 42,9 % des joueurs présentant au moins 1 couronne délabrée ont subi un traumatisme alvéolo-dentaire.
- 55,8 % des joueurs présentant des facettes d'usure ont eu un traumatisme alvéolo-dentaire.
- 53,8 % des bruxistes ont eu un traumatisme dentaire.

Plus la fréquence de consultation est éloignée, plus le risque de traumatisme serait grand.

- 29,9 % pour une consultation de plus d'un an
- 28,1 % pour une consultation de moins d'un an
- 24,1 % pour une consultation de moins de 6 mois.

Le type de classe d'Angle ne semble pas avoir de lien avec la prévalence traumatique.

- Classe I : 27,3 % de traumas
- Classe II : 28,2 % de traumas
- Classe III : 30,4 % de traumas

Il n'existerait pas de rapport avec le recouvrement dentaire mais avec le surplomb.

- Entre 0 et 2 mm : 27 % de traumas
- Plus de 2 mm : 32,5 % de traumas
- Inférieur ou égal à 0 : 29,6 % de traumas.

La présence d'un surplomb important ou un inversé d'articulé augmenterait la prévalence traumatique.

9.4.5.5 - Relation taille/poids/traumatologie dentaire

Le poids moyen des personnes ayant eu un traumatisme dentaire est de 79,8 kg contre 77,8 kg de moyenne générale.
La taille moyenne observée chez ces mêmes personnes est de 176,8 cm (contre 176,3).

Il semble donc que les personnes traumatisées aient un gabarit plus important que les autres en moyenne.

De plus, les joueurs de plus de 80 kg ont un risque de traumatismes de 31,1 % contre 25,6 % pour ceux de moins de 80 kg. Pour ceux de plus de 90 kg, 28,9% sont touchés. Pour ceux de plus de 100 kg, 41,9 % sont touchés.

Plus la masse corporelle du joueur augmente, plus le risque traumatique paraît important.


9.4.6 - Conclusions

370 rugbymen ont été examinés dans 14 clubs. La catégorie socio-professionnelle de ces joueurs est assez élevée et la plupart de ceux-ci ont un niveau de jeu confirmé.

La majorité des rugbymen ne portent pas de protège-dents bien que celui-ci ait une efficacité certaine. Le refus du protège-dents est en grande majorité dû à son inconfort. Certains postes sont mis en évidence par leur nombre de joueurs traumatisés plus important. Les demis d'ouverture, talonneurs, troisièmes ligne aile, arrières et piliers sont les plus exposés au contraire des ¾ aile. Le risque ne peut être attribué au seul poste. Il est aussi lié au fait que certains postes supportent moins bien le port du protège-dents (demis d'ouverture, arrières, piliers) et d'autres sous estiment les risques de traumatismes (arrières, talonneurs, troisièmes ligne aile).

Des facteurs favorisant les traumatismes ont été nettement mis en évidence : la présence de dents délabrées, un surplomb important, une masse corporelle importante.

Il convient de bien examiner chaque sportif afin de répondre au mieux à sa demande. Il n'existe pas une solution mais des solutions adaptées à chacun pour prévenir efficacement les traumatismes maxillo-faciaux.

Thèse - Chapitre 9